J’ai cette chance là de pouvoir m’arrêter pendant que les gens courent. Il est un cadeau qu’on devrait tous pouvoir contempler : le spectacle de la fuite du temps. Il va au devant mais tout se passe toujours maintenant. Et ce soir, sur ce pont qui traverse l’Oise, le soleil couchant faisait des miracles. J’étais suspendu sur un muret de pierres. J’observais ces lumières en questionnant ma sensibilité face à tout ça. Étais-je touché ?
En fait, nous nous enfuyons plus vite que le temps. J’ai l’impression de rater tout le présent à vouloir sauter d’une chose à l’autre, à vouloir tout ou à ne rien vouloir faire. Je m’abrutit pour tuer l’ennui – parce que c’est plus simple comme ça – puis imbécile, je retombe dans un «je ne sais pas quoi». On se mord la queue. Je marche en tapotant mon téléphone, pendant que le reste file à toute allure. Je ne veux pas perdre mon temps alors je prends de l’avance sur le rien. Et si une belle image me chatouille le coin de l’œil, je la cadre et l’envoie au cloud #couchédesoleildefeu. C’est à ce moment là qu’un illustre inconnu m’arrache mon téléphone et me jette par dessus bord. La chute est courte. La douche est glaciale et le réveil douloureux. La surprise me noie et le temps continue de couler.
Ce soir, mon cœur brûle encore plus fort que la morsure du froid. Il frappe fort ma poitrine pour me faire vibrer sous le ciel flamboyant. Je suis allumé comme le couchant, éclairé de ses reflets rouges roses orangés, de toutes ces teintes de couleurs qui avalent le bleu et se marient sur les nuages du soir. Je suis seul adossé à mon petit mur, invisible aux yeux des gens qui passent ou s’arrêtent pour un cliché vite fait. Puis disparaissent comme s’il n’y avait rien à voir. Je suis touché parce que j’ai l’impression que le monde ne regarde pas dans la bonne direction.
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