Qu’est-ce qu’il y a après demain, demande l’enfant.
« Une réponse simple, il n’y a rien. Tout ce qui est se trouve avant, bien avant. Aujourd’hui et maintenant c’est tout ce qui se joue. L’histoire s’écrit là. Pas de retour possible, ce qui est fait est fait. Seul le pardon peut défaire certaines choses. Pour d’autres, il y aura le temps. Un peu ou beaucoup, mais dans tous les cas tout fini par disparaître. C’est la nature des choses. Alors il faut employer son temps – et quand je parle de temps, je veux dire l’instant – cet instant unique qui se démultiplie en continu, à faire ou dire des choses justes. Ou déposer des silences, qu’ils soient légers ou lourds n’a pas d’importance, si quelque part ils font du sens. C’est bien et bon de vivre, c’est une chance qui n’est pas la même pour tous. Alors le moment présent ne peut-être négligé à tout va. Même s’il est important de s’adonner aux choses qui semblent inutiles et qui pourtant sont primordiales. Je parle d’amour, des arts, du rire et des balades sous le ciel. Ça nous apprend à être nous-même, à connecter, déconnecter, reconnecter, à vibrer de façons différentes et infinis, à respecter le peu même quand on peut être si grand.
Après ça mais toujours avant l’après-demain, vient le moment entre l’aujourd’hui et le demain. Ce moment de repos, de détente où l’on se dépose et on oublie son propre poids. Notre corps en surface s’éteint et notre vie plonge dans un ballet inconscient. Là tout est possible. Le passé se classe et se range avec l’imaginaire. Des vérités apparaissent, certaines dissimulées dans des villes immenses que l’on sait nommer mais qui sont pourtant méconnaissables. Difficile de saisir quelque chose là dedans et parfois même impossible. Pourtant au matin, quelques bouts nous glissent encore entre les mains. C’est le temps de choisir ou d’oublier. De continuer de rêver ou d’écrire avec cette encre nocturne de nouveaux chemins pour ce jour émergeant. Le rêve n’a pas besoin d’être si loin de la réalité et chaque petit pas à son importance. Si la journée recommence c’est pour nous donner la chance de nous ajuster par rapport à la veille, en prenant compte des conseils que la nuit aura pu nous apporter. Toute main tendue est la bienvenue.
Et nous n’en sommes même pas à l’après-demain. Vois-tu ? Après-demain est si loin que en fait, après-demain tout est possible, si tu mets de l’importance dans le plus d’instants possibles. Par importance, je veux dire conscience… »
Sur ce, l’enfant lève la tête vers moi et me tend une feuille sur laquelle il a dessiné pendant que je lui parlais. Ses yeux pourtant si petit m’aspirent alors qu’ils boivent le monde à chaque seconde. Son regard m’explique qu’il a compris. Il me sourit, je suis heureux. Sur son dessin, un petit bonhomme donne un monde à un grand bonhomme.
« Je t’aime papa.
– Moi aussi mon Titou. »
Votre commentaire